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IRLANDE : 50 ANS APRÈS, JUSTICE ET VÉRITÉ POUR LES VICTIMES DU MASSACRE DE BALLYMURPHY

mai 11, 2021

– La justice s’est prononcée ce matin avec un demi-siècle de retard –

En pleine période de tension dans le nord de l’Irlande, et alors que l’impact du Brexit quant à l’avenir de la colonie britannique est dans toutes les têtes, la nouvelle prend encore davantage de poids. La commission d’enquête, initiée en 2018, concernant la tragédie de Ballymurphy, a délivré son rapport. Le verdict est tristement limpide : les 11 personnes exécutées par les forces de la couronne, âgées de 19 à 49 ans, étaient innocentes, et le terme de « massacre » s’avère totalement justifié.

9 août 1971. À Ballymurphy, quartier républicain irlandais à l’ouest de Belfast, l’occupation militaire s’effectue avec violence. La chasse aux activistes de l’IRA et ses sympathisant-es est lancée. En réponse, les barricades se forment et de jeunes manifestant-es s’arment de pierres et cocktails Molotov. À la tombée de la nuit, les premiers tirs à balles réelles commencent. Six personnes sont abattues ce soir-là, dont une qui recevra une deuxième balle tirée après son arrestation, au sein même de la prison.

Dans les deux jours qui suivent, cinq autres habitants perdront la vie. Tous par balle, à l’exception de Paddy McCarthy, qui fera une crise cardiaque, les militaires lui introduisant un revolver dans la bouche lors de son arrestation.

Durant toutes ces années, le processus propagandiste a suivi une double mécanique, sur laquelle a été calquée celle du Bloody Sunday de Derry, qui aura lieu quelques mois plus tard : couvrir les soldats et gradés responsables, tout en accusant les victimes pour leur comportement ou appartenance supposée. En somme, rendre les personnes assassinées responsables de leur propre mort.

La comparaison ne s’arrête pas là. Certains tireurs sont issus du même régiment de parachutistes ayant œuvré lors du Dimanche Sanglant. Ces meurtriers au service du pouvoir britannique ont ainsi récidivé dans leurs crimes de guerre sans jamais être inquiétés. Jamais inquiétés, à l’exception d’un seul, le « soldat F. » poursuivi 47 ans après les faits pour un double meurtre et quatre autres tentatives d’homicide en 1972. Un bien maigre bilan en comparaison de l’histoire, qui s’explique par un manque de volonté politique sur un sujet porteur de tensions, et sur une oligarchie bien décidée à couvrir les responsables en plus haut lieu. Ils sont ainsi responsables d’une occupation militaire et coloniale, d’une politique mortifère dont les exactions ne sont pas des « bavures » mais bien des moyens de coercition imposés à toute une population.

Ce verdict arrive bien tard, même s’il reste essentiel pour les familles. L’enquête, riche et méticuleuse, s’est vue ralentie par le gouvernement « nord-irlandais », présidé par le DUP, parti loyaliste fidèle à la couronne. Et comme pour la tuerie de Derry, pour laquelle David Cameron a présenté des excuses en 2010, la justice mettra des dizaines d’années à se faire, et ce partiellement, pour les proches des victimes et le peuple irlandais.

Sources : https://www.bbc.com/news/uk-northern-ireland-56986784

https://www.theguardian.com/uk-news/2021/may/11/inquest-to-report-on-alleged-killings-by-british-soldiers-in-ballymurphy

https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_de_Ballymurphy